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28 mars 2024

Sinohydro abandonne le projet du barrage de Bini à Warak (75 MW)

Le développement des infrastructures au Cameroun passera par l’application des réformes inscrites dans la stratégie nationale de développement SND30 relatives au mode de financement. Le modèle PPP (partenariat public-privé) apparait comme unique alternative au vu des dérapages observés dans la gestion des projets au Cameroun.

L’inscription du barrage de Bini à Warack dans le plan d’urgence triennal lancé par le président Paul Biya pour l’année 2015-2018 en est une illustration. Comment pouvait-on inscrire la construction d’un barrage sur un programme de trois ans ? Un projet qui nécessite au préalable des années d’études de faisabilité, études d’impact environnementaux, et recherche des financements, avant la première pierre. Conséquence : 5 ans après le démarrage des travaux, le maitre d’œuvre Sinohydro s’en va.

En 2018, l’empire du milieu qui finançait 70% des projets d’infrastructures au Cameroun avait pris une décision inédite dans ses relations bilatérales, plus aucun financement en direction du Cameroun. Les motifs coïncidaient avec les différentes interpellations de la Banque mondiale sur la non-maturation et le surenchérissement des projets. Rendu en Chine cette même année, Beijing s’était contenté de signer des accords sur le renforcement des capacités des dirigeants camerounais dans le montage des projets.

Le 21 juin 2018, le premier Ministre, chef du gouvernement, avait signé le décret N° 2018/4992/PM  fixant les règles régissant le processus de maturation des projets d’investissement public. En d’autres termes, il eut fallu un décret pour interdire le financement des projets immatures. De manière concrète, plusieurs milliards étaient volatiles dans les projets immatures qui au final faisaient rallonger le budget et la durée de réalisation : dans le guide de planification des projets incluant « Visa Maturité » et le guide dévaluation socioéconomique, la direction de l’économie au Minepat révélait que 2 500 projets sur les 4 500 financés par le gouvernement camerounais dans le BIP 2018 (Budget d’Investissement Public) étaient non matures.

Au-delà de la non maturation des projets, un autre défi, celui du choix, des priorités dans les investissements publics car en lançant les travaux de Bini à Warack, tout à coté sur la Bénoué, le barrage de Lagdo a perdu plus de 70 % de son potentiel. Pour sa réhabilitation, plusieurs études ont chiffré le coût à 100 milliards de FCFA. Rappelons le volet intégrateur de ce projet de Lagdo qui fait vivre les activités de pêche, sans oublier la sortie d’irrigation qui pourra permettre de développer une agriculture intensive. La Banque mondiale vient d’accorder un financement de 200 millions de dollars pour le financement du projet agricole « Viva Bénoué ».

Il ya quelques mois, la nouvelle équipe a la tête du MINEPAT a relancé le dialogue avec la Chine pour la levée de suspension, l’on espère que Sinohydro sera bientôt de retour. 

Le modèle PPP

En faisant le choix du modèle de financement par partenariat public-privé, les partenaires privés s’impliquent dans la gestion du projet et permet d’éviter les goulots d’étranglements. L’exemple le plus démonstratif est celui de Nachtigal Hydro Power Company (NHPC), est une SA de droit camerounais créée le 7 juillet 2016 par l’État du Cameroun et ses partenaires sur le projet du barrage de Nachtigal, 420 MW qui produira ses premier Méga l’an prochain pour être entièrement livré en 2025. Six ans, une durée moyenne pour la construction d’un barrage de 420 MW dans un pays ou deux barrages hydroélectriques, Mekin et Memve Ele ne sont pas encore livrés 10 ans après le début des travaux.

Les difficultés dans la gestion des projets autoroutiers Yaounde-Nsimalen ou Yaoundé-Douala témoignent de l’urgence du modèle PPP grâce auquel, l’autoroute Kribi-Lolabe a pu être entièrement construite.

Avec son réseau routier d’environ 747 000 km, le plus long d’Afrique, il est en même temps le plus moderne du continent. C’est au milieu des années 1990 que l’Afrique du Sud a initié le modèle partenariat public-privé pour développer son réseau routier. Ceci du fait du niveau élevé des dettes et une limite sur la garantie de l’État, le soucis d’accélérer le développement et stimuler l’économie, dépenses insuffisantes du gouvernement sur les grandes infrastructures et la dépendance du gouvernement du secteur privé pour participer au développement économique. Les mêmes situations que traversent aujourd’hui le Cameroun.

En Afrique du Sud, le gouvernement fait appel à des financements privés pour planifier, construire et entretenir des routes. Une fois les routes construites, les opérateurs privés perçoivent des frais de péage qui leur permettent de récupérer leurs coûts et de réaliser un retour sur investissement raisonnable avant de transférer le projet à l’État. Le gouvernement sud-africain a crée une entreprise autonome, SANRAL à l’image du fond routier, qui s’occupe des routes et des péages routiers, tous automatiques.

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